Tel père, telle fille
Tel père, telle fille comédie de Olivier de Plas
avec :
Vincent Elbaz, Elodie Bouchez, Léa Drucker, Frédérique Bel et Daisy Broom
durée : 1h25
sortie le 1er août 2007
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Synopsis
À 30 ans, Bruno (Vincent Elbaz), rock-star has been vit toujours aux crochets de sa petite amie (Frédéric Bel). Les temps sont durs... surtout quand une ex (Léa Drucker) ressurgit de nulle part pour lui apprendre qu'il est le père de Nancy (Daisy Broom), 13 ans, dont il n'a jamais soupçonné l'existence. Il va alors faire la connaissance de cette jeune fille bien déterminée à vivre pleinement sa crise d'adolescence, alors que lui-même n'en est pas encore sorti. Epaulé par sa meilleure amie Sandra (Elodie Bouchez), c'est l'occasion pour Bruno de grandir enfin...
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L'épanouissement d'un jeune cinéaste
S'il envisage dans un premier temps d'obtenir un diplôme de Philosophie et d'Histoire de l'art, c'est une maîtrise de cinéma qu'il décroche. Son chemin croise ensuite très vite celui de François Kraus et de Denis Pineau-Valencienne, qui lui donnent en 1997 l'occasion de réaliser son premier court-métrage, Une place au soleil. Ils poursuivent cette aventure commune avec trois autres courts, 1020 hectopascals en 1998, Gaïa en 1999 et Libre échange en 2004. Tel père, telle fille est son premier long-métrage, il s'y est investi avec fougue, le récit de Virginie Despentes coïncidant parfaitement avec son propre univers.
- : « Qu'est-ce qui vous séduisait, à l'origine, dans le style et le ton de Virginie Despentes ? »
Olivier de Plas : « Je n'avais en fait jamais lu Teen Spirit, mais, en revanche, je connaissais assez bien son œuvre. C'est un roman à part, moins violent, on y trouve une note d'espoir qu'il n'y a pas dans les autres. Baise-moi, par exemple, est beaucoup plus radical. C'est un livre que j'adore, qui m'a profondément marqué, mais, en découvrant Teen Spirit, j'ai été surpris, enthousiasmé par cette tonalité plus joyeuse, plus légère. Virginie Despentes donne l'impression d'être plus sereine et, du coup, nous avons pu en tirer une comédie, ce que l'on imagine difficilement en se référant à son style. »
- : « Qu'est-ce qui vous a plus particulièrement touché dans ce récit ? »
O. de P. : « Je m'y suis reconnu, je me retrouvais dans la personnalité de ce héros légèrement fumiste. Je me suis imaginé plongé au cœur de cette relation totalement incongrue, apprenant tardivement que j'avais une fille de 13 ans, alors que la perspective même d'avoir un enfant m'effrayait encore. Cette idée me touchait particulièrement. Il a également une part d'adolescence dans sa façon de s'énerver contre la société qui m'amuse beaucoup. A trente ans passé, il continue à avoir des positions très radicales qui sont liées au rock. Il n'arrive pas à vieillir, cela me plaisait. »
- : « C'est un monde que vous connaissiez, vous avez été fan de rock dans votre propre adolescence ? »
O. de P. : « Non, assez peu, je me contentais d'écouter quelques morceaux chez mes copains. J'ai plus suivi le mouvement techno, je m'en sentais plus proche. En revanche, je comprends les codes de ce milieu. »
- : « Vous avez cherché à mieux le cerner ? »
O. de P. : « Ce qui est assez intéressant c'est qu'il y une nouvelle génération qui débarque sur scène avec de nouveaux groupes qui passent au Gibus et il y a une réelle émulation autour de leur prestation. Je suis allé à plusieurs concerts pour en saisir l'ambiance, avec Virginie et Patrick Eudeline, qui a ensuite suivi le tournage pour nous guider. Après une période plutôt triste dans les années 90, il y a une nouvelle énergie et j'ai relié le film à ce nouveau courant. Ce que j'ai trouvé frappant c'est qu'il y avait pas mal d'anciens rockers, comme Philippe Manœuvre, Daniel Darc, accoudés au bar derrière des jeunes de 14 ans qui dansaient devant la scène. C'était plutôt sympa et résumait bien le livre, la rencontre entre le père, rocker dépassé, et sa fille de 13 ans. »
- : « Comment avez-vous réussi à vous approprier l'univers de Virginie Despentes pour le rendre plus cinématographique ? »
O. de P. : « L'avantage ici, par rapport à d'autres scénarios, c'est qu'il y avait déjà une structure que nous avons reprise avec Bernard Jeanjean, l'écriture étant une discipline très exigeante qui m'effraie toujours. Il s'est ensuite plus occupé de la continuité du récit et je me suis axé sur les dialogues, les rebondissements comiques. Ce ne fut pas très compliqué de rendre cette histoire cinématographique car il y avait vraiment une base, un potentiel pour monter une comédie dramatique. Nous avons juste eu à accentuer quelque peu l'angle comique du roman et son évolution narrative vers la fin, le récit faisant référence à l'attentat du World Trade Center, sur lequel nous n'avions pas envie de revenir. Le reste était vraiment là. »
- : « Vous avez passé du temps avec elle pour construire le scénario ? »
O. de P. : « Je l'ai effectivement croisée pour discuter du projet, mais je ne ressentais pas l'envie de travailler directement avec elle. Il me semblait qu'il fallait qu'elle lâche le roman afin que l'on puisse se l'approprier, que je puisse le réaliser. Elle a accepté de me laisser une certaine liberté, la possibilité de la trahir en respectant certaines limites, en revanche je l'ai toujours tenue au courant de toutes les modifications. »
- : « Vous évoquiez justement le fait d'avoir développé l'axe comique du roman, en quel sens ? »
O. de P. : « Il y avait déjà quelques scènes très drôles, nous avons surtout accentué certaines caractéristiques de la personnalité de Bruno, ses travers. Mais ce n'est pas un film qui utilise tous les ressorts de la comédie typique, c'est plus une comédie de situations, scandée par quelques scènes ironiques. L'humour repose essentiellement sur le fait qu'il se retrouve dans une situation insolite, par laquelle il ne se sent pas concerné. Le côté assez peu sentimental, peu paternaliste du début, je le revendique et Vincent l'a affirmé dans son jeu. Cette gamine ne l'intéresse pas, elle n'évoque rien pour lui. Il fallait que leur relation progresse lentement, qu'il prenne conscience de ce qu'elle représente, qu'il se positionne par rapport à elle. »
- : « Qu'est-ce que Vincent Elbaz a apporté au personnage ? »
O. de P. : « Il a une incroyable énergie et c'est quelqu'un de très tonique. J'ai parfois eu du mal à le cadrer car il est beaucoup plus dans l'improvisation que moi, qui ait besoin d'avoir des repères très précis, je ne laisse d'ailleurs peut-être pas assez de place au plaisir du jeu. Finalement cette différence a servi le film, car si nous avons perdu parfois la force de certains gags qui étaient très écrits et exigeaient une grande précision, nous avons gagné en spontanéité dans les réactions du personnage. »
- : « Vous avez été étonné par le jeu de Daisy Broom ? »
O. de P. : « Elle a été repérée par hasard, elle n'était pas comédienne, mais elle avait une nature intéressante. Ce qui m'a plu, immédiatement, c'est l'indolence avec laquelle elle a répondu à mes questions la première fois que nous nous sommes croisés. J'étais inquiet, forcément, il allait falloir qu'elle adopte certains comportements qui n'étaient pas familiers à sa personnalité, comme crier, par exemple, elle n'aime pas ça. Si elle n'est pas contente, elle se renferme, fait plutôt la gueule, silencieusement. Les scènes où elle doit exploser n'étaient du coup pas faciles à gérer, et pour elle et pour moi, mais elle s'en est vraiment bien sortie, elle a beaucoup bossé. Elle est très maligne, elle écoute et apprend très vite. Vincent ne l'a pas impressionné, il s'est vraiment mis à sa portée, ce qui nous a beaucoup aidés. »
- : « Les femmes qui entourent Bruno vont lui permettre également d'évoluer, qu'est-ce qui a orienté vos choix ? »
O. de P. : « Le postulat de départ était effectivement Bruno et toutes ses femmes entre lesquelles il navigue. Avec Léa Drucker, nous nous sommes très vite trouvés. Nous avons une façon de travailler assez commune, nous aimons tourner plusieurs prises pour essayer différentes pistes. Elle a un naturel extraordinaire, elle arrive à illuminer les scènes et sa présence transcende l'écriture. Elle a très bien saisi ce personnage de bourgeoise un peu trash et en même temps complètement larguée et en a exprimé tous les contrastes sans jamais sombrer dans la caricature. Elle est à la fois touchante et très rigolote. Avec Elodie, ce qui est marquant c'est qu'elle a une incroyable disponibilité dans le travail. Elle est professionnelle et malléable et il se dégage une grande intensité de tout ce qu'elle donne lorsqu'elle se retrouve devant la caméra. Quant à Frédérique Bel, elle est étonnante, assez cyclothymique et insaisissable, ce qui donne des choses surprenantes. C'est quelqu'un de vraiment à part. Elle en fait toujours plus, il faut la cadrer, mais le résultat est vraiment très chouette. Ce sont trois femmes intéressantes, je les comprends vraiment toutes les trois. »
- : « Certaines séquences vous ont-elle apporté plus de plaisir que d'autres dans leur mise en place ? »
O. de P. : « Je suis plus attiré en général par les séquences intimistes. J'adore les scènes où les comédiens sont à table, je prends plaisir à les filmer en train de discuter face à face, cela génère souvent de délicieuses situations, quand ils sont quatre notamment, on peut jongler avec les réactions des différents protagonistes, c'est un jeu qui me plait. »
- : « Qu'est-ce qu'il se dégage de cette première expérience de long-métrage ? »
O. de P. : « Une sensation très forte. J'ai mûri et je vais certainement en tirer certaines conclusions constructives qui me permettront d'aborder la préparation et le tournage du prochain différemment. Ce qui reste pour moi le plus angoissant c'est l'élaboration du casting. Entre la prise des contacts et l'attente des réponses, c'est très long, fastidieux, avec des règles et des usages. Ce qui me motive vraiment c'est le processus du montage, je trouve ce travail de recréation particulièrement épanouissant. Le tournage, avec son côté stakanoviste, manque pour moi légèrement de poésie. Mais, dans l'ensemble, cela reste une expérience très agréable, portée par une rencontre avec un auteur et la continuité d'un échange avec des producteurs très attentionnés. »
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Fiche technique
Réalisateur : Olivier de Plas
Scénaristes : Olivier de Plas et Bernard Jeanjean
Assistant réalisateur : Mathieu Howlett
Directeur de la photographie : Pierre Cottereau
Chef décorateur : Nicolas de Bouscuillé
Ingénieurs son : Philippe Welsh, Sandy Notarianni, Rym Debbar-Mounir et Olivier Goinard
Musique originale : Tom Darnal et Sodi Marciszewer
Chefs monteurs : Marco Cavé et Luc Barnier
Producteurs : François Kraus et Denis Pineau-Valencienne
Directrice de production : Nathalie Duran
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