4 mois, 3 semaines, 2 jours
4 mois, 3 semaines, 2 jours drame de Cristian Mungiu
avec :
Anamaria Marinca, Laura Vasiliu, Vlad Ivanov, Alex Potocean, Luminita Gheorghiu, Adi Carauleanu, Liliana Mocanu, Tania Popa, Teo Corban, Cerasela Iosifescu, Doru Ana, Eugenia Bosânceanu, Ioan Spadaru, Cristina Burbuz, Marioara Sterian, Emil Coseru, Georgeta Paduraru Burdujan, Geo Dobre, Madalina Ghitescu, Catalina Harabagiu, Sanziana Tarta, Mihaela Alexandru, Hazim E’Layan, Monica Alexandrescu, Simona Stoicescu, Alexandru Conovaru, Ion Grosu, Traian Tudorica State, Cristian Ciuzan, Iancu Daniel, Robert Emanuel, Constantin Bojog, Cristina Iosif, Adina Cristescu, Calin Puia et Costica Babii
durée : 1h53
sortie le 29 août 2007
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Synopsis
1987, Roumanie, quelques années avant la chute du communisme.Ottila et Gabita partagent une chambre dans la cité universitaire d’une petite ville.
Gabita est enceinte et l’avortement est un crime. Les deux jeunes femmes font donc appel à un certain M. Bébé pour résoudre le problème. Mais elles n’étaient pas préparées à une telle épreuve.
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Note du réalisateur
Cristian Mungiu : « 4 mois, 3 semaines, 2 jours est avant tout une histoire de choix personnels. C’est aussi une histoire sur les conséquences subtiles et souvent invisibles de l’endoctrinement. Elle parle d’amitié, de responsabilité et d’amour. Mais c’est principalement une histoire sur l’avortement, à une époque où cela était considéré comme un acte de liberté et de protestation contre le régime communiste qui interdisait l’avortement afin d’augmenter la main d’oeuvre disciplinée.
Je m’en souviens très clairement, j’avais vingt ans : l’avortement n’était pas un problème moral - le plus gros souci était que l’on pouvait se faire prendre. Il arrivait souvent que les femmes meurent au cours de l’opération mais nous y pensions le moins possible.
Nous étions si jeunes. »
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L’histoire
C. M. : « L’histoire est née d’une expérience tellement personnelle qu’on ne la partage généralement pas avec les autres. Quelque chose d’inattendu s’est passé lorsque je l’ai racontée à certaines personnes : après l’avoir entendue, il s’est avéré qu’ils avaient tous vécu une expérience similaire. Je fus quelque peu surpris de découvrir à quel point ces histoires étaient variées, dissimulées, parfois horribles. Je ne les ai pas utilisées dans le film, je m’en suis tenu à celle que je connaissais le mieux, mais elles m’ont aidé à comprendre l’étendue du phénomène. »
Le scénario
C. M. : « J’ai écrit la première version en juillet dernier. Elle était plus longue que la version finale. Elle incluait notamment la visite du père de Gabita, la seule scène qui fut tournée puis coupée au montage. J’ai décidé de sacrifier une scène importante - avec de nombreux sous-entendus sur l’influence de l’éducation parentale sur le chemin que les personnages choisissent - en faveur d’une certaine cohérence narrative. Ainsi, Otilia s’impose d’elle - même comme le personnage principal. J’ai poursuivi la réécriture pendant le tournage, en particulier les dialogues. Je réécris toujours une scène une fois que je connais le lieu de tournage et je lis les dialogues avec les acteurs. J’essaie sans cesse d’insuffler de la substance au film, comme pour les scènes avec M. Bébé puis, dans la dernière partie, je laisse libre cours au thriller. »
Le contexte historique
C. M. : « En 1966, une loi interdisant l’avortement est instaurée en Roumanie. L’effet fut immédiat : dès 1970, il y avait quatre nouvelles générations d’enfants, des générations plus nombreuses que celles d’avant 1966. Le nombre d’enfants dans une classe est passé de 28 à 36, et le nombre de classes dans les écoles est passé de 2 à 10. Quand je suis entré à l’école, nous étions sept Cristian dans la classe - même les prénoms n’étaient plus suffisants pour tous les enfants. Rapidement, les femmes commencèrent à avoir recours aux avortements illégaux. Avec la fin du communisme, les sources faisaient part de plus de 500 000 femmes mortes à cause de cela. Dans ce contexte, l’avortement perdit toute connotation morale, et fut plutôt perçu comme un acte de rébellion et de résistance contre le régime. Après 1989, une fois le régime communiste tombé, l’une des premières mesures prises dans le pays fut le rétablissement de la légalité de l’avortement. Pendant des années, près d’un million d’avortements par an ont été pratiqués, ce qui représentait le chiffre le plus élevé en Europe. Aujourd’hui, l’avortement est encore utilisé comme un moyen de contraception - plus de 300 000 cas sont recensés chaque année. »
Le casting
C. M. : « Je n’avais qu’un seul acteur à l’esprit quand j’ai écrit le scénario : Vlad Ivanov - l’acteur qui interprète M. Bébé. J’avais travaillé avec lui l’année précédente pour des publicités et j’étais impressionné par son intensité et sa force. Durant le casting, alors que je rencontrais d’autres acteurs pour ce rôle, j’étais convaincu que Vlad Ivanov était le bon. Il était capable sur le tournage de débiter plus de 10 pages de dialogues sans oublier un seul mot, avec exactement l’intonation, le ton, les pauses et la gestuelle dont nous avions convenu.
J’ai pensé à travailler avec Laura Vasiliu, l’interprète de Gabita, pour mon premier film, Occident. Mais elle avait alors un appareil dentaire et refusait de l’enlever pour le rôle. Plus tard, nous avons travaillé ensemble pour quelques publicités et elle m’a convaincu de sa capacité à émouvoir. J’avais des doutes au début du casting, car elle n’était pas assez jeune pour le rôle, mais devant la qualité de son interprétation je n’ai pas eu d’autre choix que de la retenir.
Une semaine avant le tournage, il me manquait toujours mon personnage principal. J’avais exploré toutes les pistes : j’avais vu toutes les actrices roumaines de 18 à 28 ans, et n’avais toujours pas trouvé mon personnage. J’ai décidé de faire venir Anamaria Marinca de Londres, qui s’y est installée après avoir reçu un Bafta pour son premier film. Avec notre budget serré, il était quelque peu excentrique de payer un billet d’avion hors de prix pour une simple session de casting mais j’ai décidé que cela valait la peine d’essayer. Nous nous sommes rencontrés tard dans la nuit, et à son arrivée de l’aéroport, j’ai été décontenancé : Anamaria n’était pas du tout mon personnage. Mais le lendemain, nous avons lu des scènes ensemble : le changement était incroyable - mon personnage était en train de s’exprimer à travers ses lèvres comme si elle était possédée. Elle est impressionnante, tout le film repose sur ses épaules. »
La direction d’acteurs
C. M. : « J’insiste pour que les acteurs connaissent leur texte par coeur. Je leur laisse la possibilité de faire des commentaires quand nous répétons. Je travaille pour eux. S’ils ne peuvent pas dire une phrase de manière convaincante, je la supprime. Une fois qu’ils connaissent le texte, je commence à supprimer des mots afin que le dialogue sonne le plus juste et le plus naturel possible. L’équipe du son me déteste, j’encourage davantage mes acteurs à murmurer si cela les aide à exprimer leur texte plus naturellement que de jouer avec une voix déformée qui peut être enregistrée. S’il y a quelque chose dont je suis parfaitement satisfait dans ce film, c’est du jeu des acteurs. »
Le tournage
C. M. : « Je tourne seulement en décor naturel, je n’aime pas les studios. De nombreuses prises dans le film montre les décors à 180, 270 ou 360 degrés. J’aime lorsque l’environnement raconte également son histoire. Si vous avez déjà été sur un tournage, vous pouvez apprécier le désordre environnant. Tout lieu de tournage a une base, un générateur, des lumières, beaucoup de câbles, l’équipe de réalisation et tant d’autres choses. Quand on décide de faire un cercle avec la caméra, une équipe entière de plusieurs dizaines de personnes doit courir derrière la caméra durant la séquence, et le faire en silence. C’est parfois comique de les regarder.
Nous avons décidé de ne faire que des plans séquences ; ainsi nous avons des scènes où la caméra suit l’acteur sur plus de 100 mètres, en commençant dans une rue et en entrant finalement dans un appartement. C’est terriblement difficile, mais l’effet est tellement naturel, que cela valait la peine de le faire. »
Les références
C. M. : « J’ai essayé de faire un film sur mes personnages et mon histoire, pas sur la période. Je voulais que la période ne soit que le contexte et non pas le sujet du film. J’ai essayé de respecter et de re-créer la réalité autant que possible sans pour autant me focaliser sur les stéréotypes et les repères de la fin de l’ère communiste. Les objets de cette époque sont tous là, dans le film, mais en arrière-plan : le bus qui passe en pétaradant, la Lastun, voiture roumaine qui ressemblait à un fer à repasser, les coffres de pacotille, les murs recouverts de livres. Les habitudes sont là aussi : le paquet de Kent était bien plus important que l’argent avec lequel on le payait, on ne pouvait rien résoudre sans cela. »
L’esthétique
C. M. : « Avant le tournage j’ai discuté avec Oleg Mutu, mon partenaire et directeur de la photographie, du style que je voulais donner au film. Nous avons décidé de garder les choses aussi sobres que possible et de supprimer tout ce qui nous semblait organisé ou conventionnel. Nous n’avons pas utilisé de trépied ni de steady-cam, pas plus de dolly ou de grue. Nous avons décidé de ne tourner qu’un plan par scène et de laisser les acteurs utiliser également l’espace derrière la caméra. Nous ne voyons jamais le visage d’un acteur de face, beaucoup de phrases sont en voix off. Avant le tournage, nous faisons un point et appliquons une stratégie avec l’équipe. On essaie de se concentrer sur l’émotion et la vérité. »
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Fiche technique
Un film de : Cristian Mungiu
De la série : Tales from the golden age
Image : Oleg Mutu
Décors : Mihaela Poenaru
Montage : Dana Bunescu
Son : Titi Fleancu, Dana Bunescu et Cristian Tarnovetchi
Mixage : Cristinel Sirli
Costumes : Dana Istrate
Maquillage et Coiffure : Ioana Angelescu et Lidia Ivanov
Post-production : Abis Studio
et effets spéciaux : Alina Tapardel
Directrice de production : Florentina Onea
Producteur Délégué : Dan Burlac
Producteurs associés : Mobra Films Production
Produit par : Oleg Mutu et Cristian Mungiu
Avec le soutien de : Romanian National Center for Cinematography - Cnc The Hubert Bals Fund of the Rotterdam Film Festival
Et la participation de : Mindshare Media, Bv McCann Erickson România, Romanian Television et The Anonimul Foundation
Co-produit par : Saga Film et Alex Teodorescu
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présentation réalisée avec l’aimable autorisation de
remerciements à Amandine Dayre, Mathieu Piazza et Mounia Wissinger
logos, textes et photos © www.bacfilms.com
remerciements à Amandine Dayre, Mathieu Piazza et Mounia Wissinger
logos, textes et photos © www.bacfilms.com